La Cour d’appel d’Angers vient de relaxer un internaute qui avait envoyé un message contenant un lien vers des contenus préjudiciables pour des mineurs. Les juges ont considéré qu’il n’était pas susceptible d’être condamné sur le fondement de l’article 227-24 du Code pénal.
Par un arrêt du 10 juin 2003, la Cour d’appel d’Angers vient de statuer sur l’application des dispositions de l’article 227-24 du Code pénal à l’internet. Aux termes de cet article, le fait soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d’un tel message, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 75000 euros d’amende lorsque ce message est susceptible d’être vu ou perçu par un mineur.
En l’espèce, un internaute avait signalé à la brigade de gendarmerie de son domicile le fait qu’il recevait par courrier électronique différents messages contenant ou renvoyant vers des sites proposant des photographies à caractère morbide. Saisi, le Tribunal correctionnel du Mans condamna le 25 novembre 2002 l’expéditeur des messages à 3000 euros d’amende sur le fondement de l’article 227-24. Les juges relevaient que « l’existence de l’élément intentionnel de l’infraction est bien constitué dès lors qu’il est établi que l’expéditeur ne pouvait méconnaître le caractère violent des images du site incriminé, qu’il en a assuré la diffusion en envoyant un message permettant de faire le lien avec le dit site et qu’il ne s’est pas assuré de l’exactitude des coordonnées de ses destinataires, de sorte que son message était ainsi susceptible d’être lu par des mineurs ».
Interjetant appel, le prévenu relevait que le courrier électronique est assimilable à une correspondance privée, protégée à ce titre par le secret des correspondances, et par conséquent non accessible par des mineurs. Le ministère public, quant à lui, requérait la confirmation du jugement au motif que l’envoi du lien qui permet d’accéder à un site comportant des messages violents ou pornographiques participe à leur diffusion en permettant la circulation des photographies litigieuses.
La cour d’appel rejette cet argument et prononce la relaxe de l’expéditeur du message. En effet, elle relève que le courrier électronique est assimilable à une correspondance privée. « Il est protégé par mot de passe personnel et confidentiel qui est composé par l’usager au moment de sa connexion à internet ou à sa boîte aux lettres électronique. Son titulaire est le seul à y avoir accès et il est responsable de son utilisation. Ce n’est que par sa volonté ou sa négligence qu’un mineur peut la consulter ». Dans ces conditions, les juges estiment que l’élément moral de l’infraction n’existe pas et prononcent donc la relaxe du prévenu. Le ministère public a décidé de se pourvoir en cassation contre cette décision.